Luc MICHEL
Avec PCN-AMKP – PCN-SPO – Belga – AFP / 2013 06 22 /
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La lutte contre le régime autoritaire des islamistes « néo-ottomans » de l’AKP passe aussi parl’Allemagne. Où se trouve la plus grande communauté turque immigrée de l’UE.
L’Allemagne abrite en effet la plus grande communauté turque des pays de l’Union européenne et de petites manifestations y ont eu lieu précédemment en solidarité avec les opposants au gouvernement islamo-conservateur d’Erdogan.
COLOGNE : 80.000 PERSONNES DEFILENT CONTRE ERDOGAN !
Jusqu’à 80.000 personnes, répondant à l’appel de la communauté islamique alévie (une des sectes de l’Islam, qui regroupe une part importante des musulmans en Turquie), ont manifesté ce samedi à Cologne (ouest de l’Allemagne) contre le gouvernement turc d’Erdogan, ont annoncé les organisateurs du rassemblement.
« Pour la tenue immédiate de nouvelles élections », a lancé le secrétaire-général de la Communauté alévie d’Allemagne, Ali Dogan, pour ce rassemblement anti-gouvernemental turc qui s’annonce comme le plus important en Allemagne depuis le début de la contestation contre le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan. Les manifestants, venus de toute l’Allemagne mais aussi de France, de Suisse et d’Autriche – mais pas de Belgique, où l’AKP par des contacts avec des politiciens d’origine turque élus au sein des partis social-démocrate PS et social-chrétien CDH cadenasse la communauté immigrée turque -, étaient réunis avec ce slogan: « Taksim (le nom de la place d’Istanbul devenue le symbole de la révolte anti-Erdogan, ndlr), c’est partout. La résistance c’est partout. Finissons-en avec la dictature d’Erdogan ».
L’alévisme constitue une branche hétérodoxe de l’islam essentiellement présente en Turquie. L’Allemagne, où vivent quelque trois millions de Turcs ou personnes d’origine turque, accueille également quelque 500.000 Alévis qui se présentent volontiers comme libéraux notamment envers les femmes. De nombreuses manifestations anti-Erdogan se sont déroulées ces dernières semaines en Allemagne, notamment à Berlin, en parallèle à la fronde stambouliote.
BERLIN APPELE LA TURQUIE A RESPECTER « LA LIBERTE DE MANIFESTER ET D’EXPRESSION »
Via Twitter, Berlin a appelé la Turquie à respecter « la liberté de manifester et d’expression », selon un tweett du porte-parole du gouvernement allemand, Steffen Seibert, diffusé dimanche dernier. « Le gouvernement allemand renouvelle sa mise en garde: la liberté de manifester et d’expression doit être garantie, les citoyens pacifiques doivent être respectés », écrit Seibert, réagissant aux derniers événements en Turquie.
Dans un autre tweet, M. Seibert se prononce en faveur de la « poursuite du dialogue » en Turquie, ajoutant que « le gouvernement allemand appelle à nouveau toutes les parties à la raison ».
Une lettre ouverte signée par une vingtaine de personnalités célèbres du monde artistique, dont le réalisateur allemand d’origine turque, Fatih Akin, a été adressée à la chancelière allemande Angela Merkel, l’appelant à s’engager en faveur de la fin de la violence en Turquie, a indiqué leur porte-parole.
Deux des principaux syndicats turcs ont annoncé dimanche une grève générale à partir de lundi dans toute la Turquie pour dénoncer les violences policières contre les manifestants opposés au Premier ministre Recep Tayyip Erdogan, a déclaré à l’AFP le porte-parole du syndicat KESK. « Nous nous mettons en grève demain (lundi) à travers le pays, avec le (syndicat) DISK et d’autres organisations », a indiqué Baki Cinar, porte-parole du syndicat KESK. Des médecins, ingénieurs, architectes et dentistes se joignent à l’appel à la grève.
Les organisations syndicales appellent également à la fin « immédiate » des violences policières. Ces syndicats avaient déjà observé un grève mercredi au lendemain d’une opération coup de poing de la police pour vider la place Taksim d’Istanbul de ses dizaines de milliers de manifestants. Ce premier appel à la grève générale avait été timidement suivi. La Confédération syndicale des ouvriers révolutionnaires (DISK) revendique 420.000 membres et la Confédération syndicale des salariés du secteur public (KESK) 250.000 membres. Le gouvernement islamiste juge « illégale » la grève générale et menace de sévir. A nouveau !
ERDOGAN PERD SON CALME ET … MENACE L’ALLEMAGNE DE REPRESAILLES
Le ton est violemment monté dès ce vendredi entre Berlin et Ankara, la Turquie rejetant les critiques allemandes sur la répression des manifestations anti-Erdogan et y voyant des menaces déguisées sur le processus d’adhésion à l’Union européenne. Les ambassadeurs des deux pays ont été convoqués aux ministères des Affaires étrangères respectifs.
Le ministre turc AKP des Affaires européennes, Egemen Bagis, est même allé jusqu’à menacer la chancelière Angela Merkel de « réactions » côté turc si elle ne revenait pas sur ses déclarations de lundi. Elle avait alors qualifié de « beaucoup trop dure » la répression policière contre les manifestants opposés au Premier ministre islamo-conservateur, Recep Tayyip Erdogan. « Il y a eu des images effrayantes, sur lesquelles on pouvait voir que l’on a réagi de façon beaucoup trop dure, selon moi », avait notamment déclaré Merkel dans un entretien à la chaîne de télévision allemande RTL.
Ces propos avaient déjà été vertement critiqués jeudi par M. Bagis, qui avait accusé Mme Merkel d’utiliser la situation en Turquie à des fins de « politique intérieure », avec en tête les élections législatives allemandes du 22 septembre. « Mme Merkel doit savoir que ceux qui s’occupent de la Turquie finissent mal. Regardez ce qui est arrivé à (Nicolas) Sarkozy », avait ajouté M. Bagis en rappelant la défaite à la présidentielle de 2012 de l’ex-chef de l’Etat français, notoirement hostile à l’entrée de la Turquie dans l’UE.
En réaction à ces propos, le ministère allemand des Affaires étrangères a convoqué vendredi, en milieu de journée, l’ambassadeur de Turquie à Berlin. »Ce sont des propos qui ont suscité une grande incompréhension (et) notre position va être exposée avec toute la clarté nécessaire » , a expliqué le porte-parole du ministère Andreas Peschke. Il a également assuré que, du point de vue allemand, il n’y avait « pas de lien direct » entre la répression des manifestations en Turquie et les discussions avec l’UE, mais il s’était empressé d’ajouter que « bien sûr, dans la vie, tout est lié ».
Ankara a également annoncé son intention de convoquer un représentant diplomatique allemand de haut rang dès vendredi. « Si l’ambassadeur est à Ankara, il sera convoqué aujourd’hui (vendredi), sinon ce sera le numéro deux de l’ambassade qui le représentera ou alors nous attendrons que l’ambassadeur revienne dans la capitale », a expliqué une source diplomatique turque sous couvert d’anonymat.
ISLAMISTES NEO-OTTOMANS ET CLUB SOCIAL-CHRETIEN :
LES IDEOLOGIES SECTAIRES CONTRE LA GRANDE-EUROPE
L’autoritarisme et la réislamisation rampante de la Turquie par l’AKP, contre l’orientation européenne d’Attaturk, sert évidemment de prétexte à la Démocratie-chrétienne germano-européenne pour refuser l’intégration de la Turquie dans l’UE. Pour les partisans de l’UE conçue comme un « club chrétien », une Europe-croupion ancrée dans le monde atlantique, la dérive liberticide d’Erdogan est … du pain-bénit.
La chancelière, comme son parti conservateur de la droite CDU/CSU (Union chrétienne-démocrate, Union chrétienne-sociale), ont en effet toujours affiché leur scepticisme au sujet des négociations d’adhésion de la Turquie à l’UE, accordant leur préférence à un « partenariat privilégié » (sic).
Dans le contrat de coalition gouvernemental conclu il y a quatre ans avec le Parti libéral FDP, elle avait toutefois accepté que cette demande soit « considérée comme un processus à l’issue ouverte, pouvant déboucher ou non sur une pleine adhésion de la Turquie ». Mais sa position anti-adhésion doit être réaffirmée dans le programme de la CDU/CSU pour les élections de l’automne, qui doit être adopté précisément ce dimanche, au grand dam d’Ankara.
Avant l’éclatement des troubles dans plusieurs villes turques, la chancelière avait semblé favorable, sans grand enthousiasme on s’en doute, à l’ouverture d’un nouveau chapitre de négociations, mais des diplomates européens ont indiqué que « l’Allemagne et les Pays-Bas s’opposaient désormais à cette nouvelle étape », invoquant « la brutalité de la répression des manifestations antigouvernementales » qui agitent la Turquie depuis près de trois semaines.
« Si un accord unanime des 27 n’est pas trouvé lundi à Bruxelles, la conférence intergouvernementale qui devrait donner mercredi son feu vert à l’ouverture de ce nouveau chapitre pourrait être reportée », selon des diplomates européens. Le gouvernement turc a, de son côté, menacé il y a une semaine de faire intervenir l’armée pour empêcher d’éventuelles manifestations à Istanbul et dans toute la Turquie …
Luc MICHEL